Fact-checking : @les.conseils.pharma.de.lea sur le cholestérol

Introduction

Je reçois beaucoup de messages me demandant mon avis sur des publications relatives à la nutrition et la santé. La plupart du temps, ce sont des questions simples concernant des posts touchant des sujets tels que la “relance métabolique” auxquelles je réponds qu’il n’existe aucune preuve pour soutenir la pertinence de telles méthodes. 

Récemment, on m’a envoyé une publication de @les.conseils.pharma.de.lea, docteur en pharmacie dite “la première pharmacienne connectée » sur le cholestérol.  

Ayant trouvé cette publication assez alarmiste, il m’a semblé pertinent de rédiger un article pour vérifier la cohérence de chacune des revendications avec les preuves scientifiques. Alors, allons-y.

Les revendications

“Le cholestérol est vital à notre santé” 

Fondamentalement, la rhétorique commence par une explication mécaniste des rôles du cholestérol dans l’organisme (slide 2). Nul ne dénie que le cholestérol joue de nombreuses fonctions vitales. Cependant, ce discours ne fait que rendre le profane confus. 

En effet, il est nécessaire de distinguer le cholestérol transporté par les particules LDL, du cholestérol qui est synthétisé par les cellules. Les cellules synthétisent le cholestérol dont elles ont besoin et ne sont pas dépendantes du cholestérol transporté par les particules de LDL (1).

Il pourrait également s’agir de spéculations mécanistes extrêmement bancales de ma part mais nous disposons de données de résultats permettant de soutenir ces affirmations.

Par exemple, l’effet des inhibiteurs de la PCSK-9 (médicaments hypocholestérolémiants) sur les niveaux de vitamine E et d’hormones stéroïdiennes a été testé. Les résultats n’ont révélé aucun effet sur les niveaux de vitamine E tissulaires et d’hormones stéroïdiennes surrénaliennes ou gonadiques, même chez les participants ayant atteint des taux extrêmement bas de LDL-C (<15 mg/dL) (2). 

Mais même en prenant l’hypothèse de départ d’un point de vue purement mécaniste, existe-t-il des raisons de conserver un taux de cholestérol LDL plus élevé pour nourrir les cellules de l’organisme ?

Les besoins physiologiques en cholestérol ont été examinés par Brown & Goldstein en 1985, lors de leur découverte concernant la régulation du métabolisme du cholestérol qui leur a valu le prix Nobel de physiologie et de médecine en 1985 (3) : 

“Le récepteur se lie de manière optimale aux LDL lorsque la lipoprotéine est présente à une concentration en cholestérol de 2.5 mg/dl . Compte tenu du gradient de 10 à 1 entre les concentrations de LDL dans le plasma et le liquide interstitiel, un taux de cholestérol LDL dans plasma de 25 mg/dl serait suffisant pour nourrir les cellules du corps avec du cholestérol.”

Cela signifie que le récepteur LDL est très vite saturé. Soyons clair, vous n’arriverez pas à descendre sous 25 mg/dL à moins de suivre une thérapie médicamenteuse très intensive (et même dans ces conditions, il se pourrait que cela ne soit pas réellement un problème, comme vu précédemment). 

“L’hypercholestérolémie n’est qu’un témoin mais les véritables coupables sont l’inflammation de bas grade, un excès de stress oxydatif entraînant une oxydation du LDL cholestérol, la consommation d’acide gras trans, d’acide gras saturés, l’insulinoresistance, un déficit en vitamine D, un excès d’homocystéine, du diabète (qui au passage peut-être favorisé par la prise de statines), une dysbiose, une hyperperméabilité intestinale… En effet l’athérosclérose est une maladie inflammatoire chronique autoimmune, l’intestin est donc au centre de la prise en charge.”

Ensuite, Léa Wauquier suggère que l’hypercholestérolémie n’est pas un facteur causal de maladies cardiovasculaire en soi mais n’est qu’un corrélat d’une série d’autres variables, elles-mêmes causales. J’ai donc décidé d’examiner chacune d’entre elles individuellement.

LDL oxydé

L’oxydation des particules de LDL fait partie intégrante du procédé conduisant à l’athérosclérose. En effet, les particules de LDL contiennent une protéine appelée ApolipoprotéineB (ApoB), qui a une affinité pour des structures qui tapissent notre espace sous-endothélial appelées protéoglycanes. Ainsi, les particules de LDL en circulation sont susceptibles de pénétrer dans cet espace où leur oxydation est inévitable. Ces mécanismes provoquent une réponse immunitaire impliquant certains globules blancs appelés macrophages qui consomment les particules de LDL oxydées et conduisent à une cascade de processus menant à la formation de plaque sur la paroi des artères (athérosclérose). Avec le temps, l’accumulation de plaque conduit à l’obstruction du vaisseau ou la plaque finit par se rompre avec des conséquences pouvant être mortelles. 

Cependant, il est nécessaire de préciser que c’est l’oxydation des particules une fois retenues dans l’espace sous-endothélial qui est problématique, et non le LDL oxydé dans le sérum. Il existe toujours un certain pourcentage de LDL qui est oxydé dans le sang et celui-ci est également éliminé assez rapidement. 

Comme illustré de manière très élégante dans le graphique ci-dessous de la déclaration de consensus de la Société Européenne d’Athérosclérose (4), la rétention des particules de LDL dans l’espace sous endothélial précède l’oxydation lors du procédé menant à l’athérosclérose.

Tiré de (4). Résumé des principaux mécanismes sous-jacents relatifs à l’entrée, la rétention, et l’accumulation de particules de LDL dans la paroi artérielle, et les événements en aval induits par les LDL qui sont au cœur de la pathogenèse complexe de athérothrombose.

À nouveau, il ne pourrait s’agir que de spéculations mécanistes bancales mais ces mécanismes sont corroborés par des données de résultats. 

La relation entre la mesure de LDL oxydé dans le sérum et les maladies coronariennes a été investiguée dans la Health Professionals Follow-up Study (5). Les résultats ont révélé que l’association ne survivait pas aux ajustements statistiques réalisés sur le taux d’ApoB. Le taux d’ApoB représente une mesure des particules de LDL ainsi que des autres lipoprotéines athérogènes contenant une ApoB (VLDL, IDL, Lp(a)).

Tiré de (4). Concentration relative d’apolipoprotéine B (ApoB) contenue dans les lipoprotéines circulantes basée sur la médiane de la population.

Par contre, l’association entre  le taux d’ApoB et le risque de maladies coronariennes est restée significative après ajustement sur le taux de LDL oxydé. Cela signifie que le taux de LDL oxydé n’est pas un facteur causal indépendant, et que nous disposons de marqueurs plus robustes. 

Ainsi, la cible actuelle de thérapie se focalise à diminuer le nombre de particules LDL afin de diminuer leur rétention dans l’espace sous-endothélial. Il n’y a actuellement aucune preuve que diminuer le LDL oxydé, indépendamment du nombre de particules, présente un quelconque avantage.

Inflammation

L’inflammation systémique est un facteur qui a fait l’objet d’examens approfondis au sein de la science cardiovasculaire.

Comme nous l’avons vu précédemment, les particules de LDL pénètrent dans l’espace sous-endothélial, ce qui déclenche une cascade de processus qui conduisent à l’athérosclérose. L’inflammation est une variable modératrice importante, qui peut accélérer ce procédé.

La protéine C-réactive ou CRP (protéine que fabrique le foie lorsqu’il y a de l’inflammation dans l’organisme) est le marqueur inflammatoire le plus fiable en ce qui concerne les maladies cardiovasculaires, c’est-à-dire que c’est un marqueur prédictif de résultat aussi bien dans la recherche observationnelle (6) que dans les études d’intervention (7). 

Cependant, cela n’invalide pas la pertinence de la mesure du LDL-C. En effet, nous avons à disposition des données d’observation (6) ayant examiné le risque d’événements cardiovasculaires dans la population en fonction de l’exposition cumulée au LDL-C, et à la hs-CRP (high-sensitivity C-reactive protein). L’exposition cumulée à été mesurée via 4 mesure de LDL-C et de hs-CRP au cours d’un suivi de 5 ans. Les résultats ont montré que le risque était le plus important lorsque l’exposition cumulée au LDL-C et à la CRP était toutes deux élevées. À l’inverse, le risque était le plus faible lorsque ces deux mesures étaient diminuées. Entre ces deux extrêmes, il existe une situation intermédiaire, avec l’élévation de l’un seul de ces biomarqueurs.

Ces résultats sont cohérents avec des analyses de sous-groupes réalisées dans les essais de statines en fonction des niveaux de hs-CRP initiaux (8) (9). Ces données ont montré que la réduction du LDL-C permettait de diminuer le risque d’événements cardiovasculaires, indépendamment du taux de hs-CRP de départ. La réduction du risque absolu était cependant plus importante chez les patients avec des taux de hs-CRP initiaux plus élevés. Comme nous pouvons à nouveau le voir dans le graphique ci-dessous, les taux d’événements étaient les plus bas chez les patients avec les taux de hs-CRP et de LDL-C les plus faibles (9).

Tiré de (9). Taux d’événement en fonction des niveaux de hs-CRP initiaux et de LDL-C atteints à 1 mois.

Ainsi, bien que l’événement initial déclenchant l’athérosclérose soit la rétention des particules de LDL dans l’espace sous-endothélial, le taux d’inflammation peut changer la magnitude de l’effet. Si nous pouvions réduire les niveaux de particules de LDL (ainsi que des autres particules ApoB) à 0, l’athérosclérose ne se développerait probablement jamais. Mais nous ne le pouvons pas, car il s’agit d’un trait physiologique. Nous devons donc considérer l’inflammation comme un facteur de risque indépendant, même si elle n’est pas causale en soi.

Consommation d’acide gras saturés/trans

Lee Hooper et al., dans une méta-analyse publiée dans Cochrane ont examiné l’effet de la diminution des apports en graisses saturées sur le risque de maladies cardiovasculaires dans les essais randomisés contrôlés (10). Dans l’ensemble, les résultats montraient une diminution du risque d’événements cardiovasculaires de 21 % [RR 0.79, 95% CI 0.66-0.93].

Les auteurs ont également réalisé des analyses de méta-régression pour examiner quelle était la/les variables expliquant l’hétérogénéité entre les études. Fondamentalement, vous pouvez avoir à disposition différentes études dans une méta-analyse avec des résultats différents, la méta-analyse donnera une estimation sommaire des résultats de toutes ces études réunies.

Différents outils permettent une analyse plus raffinée, afin d’expliquer l’hétérogénéité entre les études. La méta-régression permet d’évaluer si l’hétérogénéité est expliquée par une/plusieurs variables dans les études incluses (âge/ sexe des participants, durée de l’étude, etc.). 

Les auteurs ont réalisé 11 analyses de méta-régression, la seule ayant montré des résultats statistiquement significatifs est le changement de cholestérol sanguin. Ces changement de cholestérol circulants, comme nous le savons d’autres recherches (11) sont majoritairement prédits par : 

  • l’ampleur de la diminution de l’apport en graisses saturées ; 
  • le nutriment par lequel sont remplacées les graisses saturées.

Tiré de (10). Méta‐régression des effets de la réduction des acides gras saturés sur les événements cardiovasculaires.

Ainsi, la diminution du risque cardiovasculaire provoquée par ces changements alimentaires est majoritairement prédite par les changements de cholestérol circulants.  

En effet, les acides gras saturés (et tout autres nutriments) ne sont pas directement causaux dans les maladies, la relation se fait via des médiateurs (dans ce cas-ci, le cholestérol circulant). 

En ce qui concerne les acides gras trans, le même argument pourrait être invoqué, mais ils ont de toute façon été majoritairement retirés de notre approvisionnement alimentaire.

Intestin

Fondamentalement, aucun lien causal n’a pu être établi entre l’intestin et quelque maladie que ce soit, aussi bien en ce qui concerne le microbiote intestinal (12) que la perméabilité intestinale (13).

Par exemple, une revue systématique de 2019 a évalué les facteurs de risque associés à une altération de la perméabilité intestinale (13). Bien que l’augmentation de la perméabilité intestinale soit associée avec des maladies chroniques comme le diabète ou le foie gras non alcoolique, aucun lien de causalité n’a pu être établi. En effet, nous ne disposons que d’études cas-témoins, montrant une probabilité supérieure de perméabilité intestinale plus élevée chez les personnes souffrant de ces pathologies (groupes de cas) par rapport aux individus sains (groupe témoin).

Cependant, comme les études cas-témoins sont rétrospectives, elles ne peuvent pas déterminer la temporalité entre l’exposition et le résultat d’intérêt. De ce fait, elles sont fortement sujettes à certains biais tels que la causalité inversée. La perméabilité intestinale augmentée serait alors une conséquence de maladies, plutôt qu’une cause.

Il n’existe ainsi aucune preuve pour affirmer que les changements de perméabilité intestinale soient un facteur causale de maladies. De même, nous ne savons pas vraiment si certains traitements ciblant la perméabilité intestinale permettraient d’améliorer les résultats cliniques. Il en est de même pour les changements de microbiote intestinal. 

La recherche sur l’intestin est à ses débuts et extrêmement déconcertante, ne tombez pas dans le piège de la rhétorique de l’intestin en tant que “cause profonde de maladies ”.

Diabète/Insulino-résistance

Le diabète/la résistance à l’insuline augmentent le risque de maladies cardiovasculaire majoritairement dans la mesure où ils augmentent le taux de lipoprotéines circulantes contenant une ApoB. En effet, pour ces individus, il existe typiquement une discordance entre les taux de LDL-C et d’ApoB (14) car ces conditions mènent à la régulation à la hausse d’autres particules athérogènes que les LDL (i.e., VLDL-2, IDL).

Ces considérations n’invalident pas la pertinence de la mesure du LDL-C, puisque les particules de LDL représentent environ 90% des particules ApoB en circulation en situation normale. Le taux d’ApoB représente simplement une mesure avec un meilleur pouvoir prédictif, lorsque les circonstances le permettent ou le nécessitent.

Le diabète est également associé à d’autres facteurs de risque tels qu’une inflammation élevée, les lésions d’organes cibles, etc. Pour ces raisons, la Société Européenne d’Athérosclérose, dans ses guidelines de 2019 recommande une diminution plus agressive des taux de LDL-C et une analyse du taux d’ApoB pour ces individus à haut risque (15).

Tiré de (15) résumé des dyslipidémies dans le syndrôme métabolique et le diabète de type 2

Déficit en vitamine D

Bien que le taux de vitamine D (25-OHD) soit inversement associé au risque de maladies cardiovasculaires dans la littérature observationnelle (16), les effets de la vitamine D sur ce critère d’évaluation se sont montrés très décevants dans les études d’intervention.

Par exemple, le large essai VITAL (vitamine D & oméga-3 trial)  comprenant >25 000 participants (suivi médian 5.3 ans) n’a montré aucun effet de la supplémentation en vitamine D (2000 IU) sur le risque d’incidents cardiovasculaires majeurs (17).

De ce fait, il est probable qu’un faible taux de 25-OHD ne soit qu’un corrélat d’un problème métabolique sous-jacent, mais ne soit pas causal de maladies cardiovasculaires en-soi.

Excès d’homocystéine

La relation entre l’homocystéine et les maladies cardiovasculaires reste pleinement à élucider mais concernerait le risque d’AVC en particulier. Nous disposons de données de randomisation mendélienne ayant examiné la relation entre les niveaux d’homocystéine génétiquement médiés et le risque de différents types de maladies cardiovasculaires.

La randomisation mendélienne est une forme d’épidémiologie qui étudie la relation entre des prédispositions génétiques et des résultats de santé. Cette conception de recherche repose sur l’hypothèse que les gènes sont distribués au hasard dans la population. Nous disposons ainsi d’un groupe exposé (qui possède la variante génétique d’intérêt) et d’un groupe témoin de comparaison (qui ne possède pas la variante génétique d’intérêt) et nous pouvons supposer avec suffisamment de confiance que les covariables pertinentes soient équitablement distribuées. Il s’agit fondamentalement d’une forme de randomisation naturelle, via les gènes. 

Les résultats ont révélé que des taux d’homocystéine génétiquement plus élevés étaient associés à un risque plus important d’AVC (18). En revanche, les résultats étaient nuls pour les maladies coronariennes.

Mais à nouveau, cela n’invalide pas le rôle causal du LDL-C dans les maladies cardiovasculaires. Dans le cas du LDL-C, il existe différentes variantes génétiques influençant le LDL-C à la baisse dans une ampleur distincte. Lorsque nous investiguons leur relation avec les maladies coronariennes via la randomisation mendélienne, nous voyons que la réduction du risque est proportionnelle à la magnitude de réduction du LDL-C (19).

Tiré de (19). Réduction du risque de maladies coronariennes par diminution génétiquement médiée de l’exposition au LDL-C.

“L’effet bénéfique des statines est dû à leur activité anti-inflammatoire et non hypocholestérolémiant

Cette question a été passée au peigne fin dans différentes méta-régressions publiées par Silverman et al. (20). La première a examiné l’effet de 25 études de statines sur le risque d’événements cardiovasculaires majeurs en utilisant la diminution du LDL-C comme variable modératrice. Les résultats ont révélé une diminution du risque de 23% [RR 0.77, 95% CI 0.71-0.84] par diminution de 38.7 mg/dL du LDL-C. La diminution du LDL-C représentait 98 % de la variabilité entre les études dans la réduction des événements vasculaires majeurs.

Tiré de (20) Diminution du risque d’événements cardiovasculaires majeurs en fonction de la diminution du LDL-C dans 25 essais de statines.

Une tentative de réfutation prévisible serait d’affirmer qu’une réduction du LDL-C plus importante est simplement due à une dose plus importante de statines, ce qui diminuerait également l’inflammation.

C’est un argument assez valable. La réponse se trouve dans une seconde méta-régression publiée par les chercheurs. Celle-ci a cette fois-ci connecté les 25 essais de statines à d’autres essais (alimentation, intervention chirurgicale, autres classes de médicaments agissant via différentes voies métaboliques). À nouveau, l’ampleur de la réduction du LDL-C prédit la diminution du risque d’événements cardiovasculaires majeurs. 

Cela signifie que toutes ces interventions sont différentes mais confèrent leurs bénéfices sur la réduction du risque cardiovasculaire via un dénominateur commun, qui est la réduction du LDL-C.

Tiré de (20) Diminution du risque d’événements cardiovasculaires majeurs en fonction de la diminution du LDL-C pour chaque classe d’intervention.

“L’hypercholestérolémie n’est pas une maladie (excepté l’hypercholestérolémie familiale d’origine génétique) mais elle peut augmenter le risque de survenue de maladies cardiovasculaires si elle est accompagnée d’autres facteurs de risques tels que le tabagisme, l’hypertension, la sédentarité.”

Soyons clairs, ces facteurs n’invalident pas qu’une relation causale entre le LDL-C et les maladies cardiovasculaires existe, leur rôle est simplement de changer la magnitude de l’effet. Par exemple, une personne avec un LDL-C élevé et un mode de vie globalement sain sera moins à risque qu’une personne avec un LDL-C élevé souffrant d’obésité, fumeur, etc.

Pour illustrer ces propos, nous disposons de données d’observation ayant évalué la relation entre les taux de cholestérol LDL et la progression de l’athérosclérose chez des sujets ne présentant pas d’autres facteurs de risque (tabagisme, tension artérielle, glycémie, CRP et hémoglobine glyquée élevée, HDL-C faible). Le LDL-C était indépendamment associé à la présence et à l’étendue de l’athérosclérose malgré l’absence d’autres facteurs de risque.

Tiré de (21). Relation entre les niveaux de LDL-C et l’athérosclérose.

La présence des particules de LDL ou autres particules ApoB est un facteur nécessaire et suffisant pour que l’athérosclérose se développe. Les autres facteurs mentionnés sont des facteurs aggravants, qui peuvent accélérer la cascade de processus menant à l’athérosclérose.

“ Dans le cas de personnes ayant déjà eu un accident cardiovasculaire, l’hypercholestérolémie doit être maîtrisée.”

Réduire le LDL-C permet de réduire le risque de maladies cardiovasculaires, peu importe que cela soit en prévention primaire et secondaire. Comme nous pouvons le voir dans le graphique présenté ci-dessous (20).

Il est également nécessaire de garder à l’esprit que la limite entre la prévention primaire et secondaire est quelque peu arbitraire. L’athérosclérose progresse graduellement de manière asymptomatique via une exposition cumulée aux lipoprotéines LDL au cours de la vie et ne provoque un événement cardiovasculaire qu’à un moment donné. 

Tiré de (20) Relation entre le taux de cholestérol LDL et le taux d’événements coronarien majeur dans 24 essais d’interventions

Dernières considérations

Le post de Léa Wauquier met en avant l’importance des changements dans le mode de vie pour obtenir des taux adéquats de LDL-C, ce qui est évidemment une bonne initiative dont je suis également très favorable à recommander. 

Néanmoins, les changements dans le mode de vie sont toujours en première ligne des guidelines médicales evidence-based, malgré ce que les praticiens “fonctionnels” ou “holistiques” voudraient vous faire croire. 

Comme nous pouvons le voir dans les guidelines de 2019 de la Société Européenne d’Athérosclérose, les changements dans le mode de vie sont placés en priorité. En fonction des taux de LDL-C initiaux et du risque cardiovasculaire total, les médicaments s’ajoutent aux changements de mode de vie (et ne se substituent pas) si nécessaire (illustré en jaune et rouge).

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Tiré de (15) Stratégies d’intervention en fonction du taux de LDL-C et du risque cardiovasculaire total recommandées par les guidelines de 2019 de la Société Européenne d’Athérosclérose. 

En effet,  certaines personnes bénéficieront d’une amplitude de baisse du LDL-C qui n’est tout simplement pas possible avec le mode de vie seul.

Comme évoqué précédemment, le risque lié au LDL-C est une question d’exposition cumulée au cours de la vie. Une personne peut déjà être dans un état d’athérosclérose avancée, sans avoir subi d’incident cardiovasculaire au préalable. 

O’Keefe et al., dans leur revue de littérature ont examiné les essais randomisés contrôlés de statines ayant évalué le taux de progression d’athérosclérose et ont réalisé une analyse de régression montrant que le seuil de progression d’athérosclérose se situait en moyenne à 67 mg/dL (22). 

C’est pourquoi, chez les personnes à risque, obtenir un taux en deçà de ce seuil pourrait être désiré dans le but de ne pas faire évoluer davantage la progression de la plaque d’athérome et éventuellement favoriser sa régression (23).

Tiré de (22) Progression de l’athérosclérose en fonction des niveaux de LDL-C atteints (mg/dL) dans les essais randomisés de statines

Ce concept de risque en tant qu’exposition cumulée au cholestérol LDL a été magnifiquement modélisé dans une review réalisée par Brian Ference et al. (24) :

En conséquence, l’âge moyen auquel survient un infarctus du myocarde (après 8 000 mg-années d’exposition cumulée aux LDL, en moyenne) passera de 64 ans pour une personne ayant un LDL-C de 125 mg/dl à 100 ans pour une personne qui maintient un niveau de LDL-C de 80 mg/dl tout au long de sa vie.

Tiré de (24) Effet cumulatif du LDL-C sur le risque de maladie cardiovasculaire 

Il convient de également de rappeler qu’aucune intervention pharmacologique n’est sans risque, mais que ce risque doit être mis en balance avec les bénéfices.

Les effets secondaires des statines semblent cependant exagérés. Une préoccupation courante concerne le risque de myopathies (lésions musculaires) et de myalgies (douleurs musculaires)

Dans des conditions d’aveugle, comparant les statines aux pilules placebo, aucune différence de ces effets indésirables ne semblent constatée chez les participants, contrairement aux conditions où ils savaient quelle pilule ils prenaient (25).

Au passage et de manière assez drôle, il existe une corrélation forte entre le nombre de sites web sur les effets secondaires des statines d’un pays et la prévalence d’intolérance aux statines (26).

Je suspecte que les publications Instagram alarmistes ne sont probablement pas là pour améliorer les choses, mais je ne suis pas tellement doué en spéculations, haha.

Bottom line

Le LDL est un facteur causal indépendant de maladies cardiovasculaires. Il est donc important d’être à l’écoute de votre médecin qui pourra vous indiquer les seuils de LDL-C à ne pas dépasser et les interventions nécessaires en fonction de votre âge, des données connues sur votre taux de LDL-C au préalable et de la présence d’autres facteurs de risque.

Références

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